Souffler l’âme iranienne dans l’instrument occidental

Fereydoun Farahani
Chercheur doctorant en design urbain
Titulaire d’un master en architecture

Un regard sur l’histoire du souffle de l’âme iranienne dans l’instrument occidental:

La première fois que le piano est venu en Iran sous le règne de Fath Ali Shah Qajar, il a été placé dans un coin de la cour et on ne saurait pas quoi faire de cet instrument occidental avancé. Jusqu’à ce que, selon Sassan Sepanta dans le livre «Perspective de la musique iranienne»:

Lors de son premier voyage en Europe au mois d’avril 1873, Nasser al-Din Shah a apporté quelques grands pianos à la cour, et comme personne à Téhéran ne savait les jouer, Mohammad Sadiq Khan Sarvar al-Molk, qui jouait habilement du dulcimer, a commencé à jouer du piano et l’a accordé pour jouer des pièces iraniennes. En outre, la première personne à avoir joué du piano de manière correcte et standard a été Gholam Reza Khan Salar Mo’azez, et après lui, Mo’tamed al-Molk Yahyaian et Mahmoud Mofakham ont commencé à jouer du piano. Parmi les élèves de Mofakham se trouvaient Hossein Ostovar et Morteza Mahjoubi (Sepanta, 2003: 114). Nous mentionnerons Mahjoubi dans les lignes suivantes.

Le premier pianiste iranien était Moshir Homayoun Shahrdar (1886-1969) qui a appris à jouer du piano chez Sarvar al-Molk et a reçu les premières expériences iraniennes de jouer du piano directement de lui. Moshir Homayoun a également été un élève de Salar Mo’azez et a essayé de faire en sorte que ce qu’il joue au piano ne soit pas loin de l’originalité du piano lui-même.

En bref, il a laissé des œuvres précieuses à la fin des périodes Qajar, Constitutionnelle et Pahlavi, et il a fait de son mieux pour jouer de cet instrument le plus iranien possible. Il a laissé des répliques aux chants des grands chanteurs comme Reza Qoli Mirza Zelli et tout cela témoigne de ses efforts pour donner l’âme iranienne à cet instrument occidental.

Un peu plus tard, Morteza Khan Mahjoubi (1898-1965) a donné à cet instrument occidental une langue complètement iranienne et a fait en sorte qu’il était difficile de croire que c’est le même piano avec lequel sont jouées la Sonate Au Clair de Lune de Beethoven et les Nocturnes de Chopin. L’une des meilleurs élèves qu’il a éduquée, est Madame Fakhri Malekpour, dont nous nous souvenons de l’accompagnement avec le chant du Maître Shajarian dans l’album « Ah Baran ».

Sepanta a déclaré à propos du style de la performance musicale de Morteza Mahjoubi: « Son style de jouer du piano illustre bien les décorations et les accents spéciaux de la musique iranienne, et en particulier les mélodies qu’il joue de la main droite ont des humeurs particulières de la musique iranienne. Tout en jouant du piano, Morteza fermait parfois les yeux et disait: « Je veux être moi-même » ».

La performance musicale de Mahjoubi et de Moshir Homayoun a été critiqué par les modernistes de la musique iranienne et ils ont estimé que cet instrument occidental avait perdu son identité et son originalité dans cette façon de jouer et que ses capacités n’étaient pas utilisées correctement. Parmi les défauts qu’ils soulèvent, figure le fait que la main gauche du musicien ne joue pas le rôle comme il se doit et…

استاد مرتضی خان محجوبی
Maître Morteza Khan Mahjoubi

Javad Maroufi (1294-1372) a tenté de régler ce problème et ses œuvres ont été un pas vers l’utilisation d’une plus grande partie des capacités du piano dans la musique iranienne. Lui, qui avait appris la manière de base de jouer du piano auprès du colonel Ali Naqi Vaziri et de Mme Tania Kharatian, croyait que le piano devait être utilisé avec ses capacités maximales dans la musique iranienne, de sorte qu’en plus de son nouveau timbre, les possibilités musicales de cet instrument soient également mises au service de la musique iranienne. Parmi ses œuvres, il y a des pièces qui peuvent être considérées comme ayant un esprit moderne en proportion de l’époque où elles ont été créées, et la plus importante d’entre elles est l’œuvre célèbre, simple et durable de Rêves Dorés.

استاد جواد معروفی
Maître Javad Maroufi

La même chose est arrivée au violon dans la musique iranienne, et cet instrument a fait son chemin dans la musique iranienne grâce aux efforts des maîtres tels que Hossein Hangafrin, Hossein Khan Ismailzadeh, Hossein Yahaghi, Reza Mahjoubi (le frère de Morteza Mahjoubi) et Majid Vafadar. Et surtout, grâce aux efforts du Maître Abolhassan Saba, l’acte de naissance iranien a été délivré pour le violon.

La compilation de la méthode d’enseignement du violon dans la musique iranienne, le radif de la musique iranienne pour le violon, la composition de pièces iraniennes pour cet instrument et l’éducation de nombreux étudiants pour jouer du violon ont été parmi les actions les plus importantes de Saba, et à la suite de ces efforts, le violon est si étroitement associé à la musique iranienne qu’aujourd’hui, on peut parler de plusieurs écoles distinctes de violon iranien; des maîtres tels que Habibullah Badiei, Asadullah Malek, Parviz Yahaghi, Ali Tajvidi, Homayoun Khorram, Mehdi Khaledi, Shahpour Niakan, Mojtaba Mirzadeh et bien d’autres.

استادان ابوالحسن صبا (چپ)، علی تجویدی (راست)
Maîtres Abolhassan Saba (à gauche), Ali Tajvidi (à droite)

Cependant, dans ce parcours artistique, il ne faut pas oublier le rôle évolué de ces instruments et leur puissance sonore; Aussi, grâce à sa grande capacité, le violon a pu trouver une place très efficace dans la musique de tous les pays orientaux (comme l’Inde et les pays arabes) et devenir un instrument universel au vrai sens du terme. Mais dans les années en question, cela est également arrivé à d’autres instruments, et même s’ils n’avaient pas d’école iranienne codifiée et académique comme le violon et le piano, de nombreux instruments occidentaux (en particulier les instruments à vent) de l’ère Qajar ont pu s’adapter à la culture iranienne.

Les plus importants de ces instruments sont la trompette et la clarinette, qui après la création de la branche de la musique de Dar ul-Funun à Téhéran et leur popularité dans la culture iranienne ont ouvert la voie à Ta’ziyeh, et pendant de nombreuses années, la clarinette a joué le rôle de l’instrument à vent le plus important dans l’orchestre Golha et de nombreux autres orchestres.

L’exemple le plus évident en est la célèbre chanson « Nava-ye Ney » du Maître Morteza Mahjoubi avec le chant du Maître Banan, dans laquelle la voix du ney est incarnée par la clarinette du Maître Vaziri Tabâr, et on n’utilise pas encore le ney iranien dans les orchestres et les émissions de radio. [Le premier piano amené en Iran était un petit piano qui a été apporté en Iran depuis la France et avait cinq octaves, et Napoléon l’a offert à Fath Ali Shah Qajar en 1806 (Sepanta, 2003: 113 -114).] [Le ney iranien a retrouvé son rôle dans la musique iranienne grâce aux efforts du Maître Hassan Kassayi, et grâce aux efforts des Maîtres Hassan Nahid et Mohammad Moussavi, il a trouvé une présence effective dans les accompagnements et les orchestres.]

Dans les mêmes années, on entend la musique iranienne grâce à la flûte jouée par les artistes tels que Changiz Asgarpour et Emad Ram, et cet instrument était utilisé dans de nombreux chants de la musique iranienne, comme réplique au chant.

Ces efforts et oeuvres émergées grâce à ces instruments dans la musique iranienne au fil des ans, ont établi la place du piano, du violon et de certains autres instruments occidentaux dans la musique iranienne. Il y a beaucoup de choses à dire sur cette place et sur le processus pour y parvenir; Mais dans ce bref article, on ne peut pas aborder l’analyse historique et artistique de ces instruments occidentaux dans la musique iranienne.

Bibliographie:

  • Sepanta, Sassan. (2003). La perspective de la musique iranienne. Téhéran: Mahour.
  • Mallah, Hossein Ali. (1990). Explorer l’espace de l’architecture et de la musique et découvrir le livre « Musique de l’Architecture ». Architecture et Musique, Collection d’articles, Compilateur: Mansour Flamaki. Téhéran: Faza.

Publié dans l’hebdomadaire Sobh-e Andisheh, n° 336, 14 août 2021

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